Le 4 novembre dernier Kanak [1] et résidentEs de Kanaky étaient appeléEs à se prononcer pour ou contre l’indépendance du territoire. Le 30 novembre nous en parlions ensemble à Dijon. Le comité NPA de Côte-d’Or a invité Marc Fouilloux, militant, familier et solidaire des luttes kanak depuis 30 ans, pour évoquer la situation sociale et politique des îles de Nouvelle-Calédonie. Sur fond de colère sociale, en métropole et dans les dits « départements et territoires d’outre-mer », il nous a paru important de revenir sur les dernières décennies de luttes contre la présence coloniale française dans le monde. Cette brûlante actualité qui pourrait paraître si lointaine rejoint par ses enjeux bien des questions que soulèvent les injustices sociales autour de nous. La présentation de Marc et la discussion riche qui a suivi en sont le témoignage.
La rencontre a commencé par une présentation de l’histoire de la colonisation française et des luttes kanak. Les premiers massacres, le statut de l’indigénat et l’extermination d’une partie du peuple kanak par la surexploitation, les violences systématiques, l’écrasement militaire des premiers soulèvements. Cette politique ouvertement raciste de l’État a cédé la place après-guerre à une politique coloniale passant par le peuplement, la domination politique et économique, le confinement territorial des populations autochtones.
À partir des années 1970 le courant indépendantiste reprend de la vigueur, sous l’effet d’une politisation accrue des étudiantEs kanak passéEs par la métropole : les « foulards rouges ». Illes dénoncent la colonisation de peuplement, l’accroissement des inégalités sociales, économiques et politiques et le prolongement d’une politique coloniale qui ne dit pas son nom. Ces courants sont à l’origine des soulèvements des années 1980, eux aussi écrasés dans le sang.
Le référendum de début novembre avait été prévu par les « accords de Nouméa », signé par quelques dirigeants kanak et l’État français en « résolution » de la crise des années 1980. En réalité, cette signature a divisé le mouvement indépendantiste et a marqué l’ensemble de la vie politique kanak depuis 30 ans. La politique de peuplement, visant à mettre en minorité les Kanak sur leur propre territoire, a continué. L’objectif colonial de la France est toujours vivace. Il se double d’un creusement des inégalités sociales et économiques entre métropolitains et Kanak, marquées territorialement par une forte ségrégation des lieux de vie, de travail et de loisir.
Dans ce contexte, le scrutin de cette année a été à juste titre dénoncé par différents courants indépendantistes, appelant les Kanak à ne pas se déplacer face à ce semblant de démocratie. Contre toute attente, ce référendum a permis au camp indépendantiste de se compter ! Le « non » n’a gagné qu’à une faible majorité (56 %). La répartition des votes sur le territoire montre que les Kanak ont voté très largement pour l’indépendance. De l’autre côté, les Caldoches – descendants des colons – et les personnes originaires de métropoles – rappelons que le droit de vote était accordé à toute personne résidant depuis seulement cinq ans sur le territoire – se sont prononcés contre l’indépendance.
Pour discuter, des étudiantEs et autres Kanak résidant à Dijon s’étaient déplacéEs, proposant leur regard sur la situation et se montrant très concernéEs par les prochaines échéances électorales : élections provinciales du printemps 2019 et le nouveau référendum de 2020. Les débats auront mis en évidence la nécessité de mobiliser contre les inégalités économiques, sociales et politiques afin de donner un sens à une lutte qui continue et sort paradoxalement renforcée de ce référendum.