NPA Bourgogne Franche-Comté
  • LE PROGRAMME PRESIDENTIEL EELV : LA RETRAITE

    8 décembre 2021

    LE PROGRAMME D’EELV POUR LA PRESIDENTIELLE : LA RETRAITE, SON FINANCEMENT ET LA SECURITE SOCIALE
    Pas question pour les Verts de revenir à la retraite à 60 ans, grand conquis social de 1981, finalement gommé par Sarkozy en 2010 avec le départ officiel à la retraite à 62 ans pour tous ou à peu près. Paradoxalement, les Verts affirment avec pertinence vouloir « un système de retraite qui ne transforme pas la durée de vie gagnée en temps de travail supplémentaire ». Or depuis 1981 la durée de vie a augmenté, alors pourquoi accepter de gâcher cette bonne nouvelle par deux ans de travail supplémentaire ? Surtout lorsque l’espérance de vie en bonne santé tourne, elle, seulement autour de 63 ans. Les Verts arguent que beaucoup de salariés aux professions moins pénibles, commençant leur vie active plus tard, arrivant encore en forme à 60 ans, peuvent et souhaitent aller au-delà. Mais en quoi le retour d’une retraite à taux plein à 60 ans serait incompatible avec le droit de prolonger sa carrière ? La différence entre les deux options c’est que, dans le système actuel, beaucoup continuent dans l’angoisse pour essayer d’atteindre une pension correcte alors qu’avec le taux plein à 60 ans, ils pourraient exercer de vrais choix, l’esprit plus tranquille. La différence entre les deux options, c’est aussi que le retour à 60 ans oblige à la recherche d’un financement à la hauteur. C’est-à-dire à faire bouger la ligne de partage des richesses, avec l’éventualité de faire payer les employeurs – ce dont ces derniers ne veulent plus et devant laquelle les Verts hésitent.
    La position de fond des Verts est donc d’accepter le recul du départ à 62 ans tout en renforçant le compte pénibilité pour permettre à plus de salariés aux emplois usant de les quitter à partir de 55 ans. Et de ne laisser personne partir en dessous du SMIC (environ 1200 Euros nets contre un minimum moyen actuel de 950 Euros). Et de revaloriser les moindres retraites des femmes par la prise en compte des temps d’engagement auprès de proches ou dans des associations. Ce qui est une voie intéressante mais peu détaillée et malencontreusement jointe à une ambiguë proposition de « transferts de trimestres validés entre conjoints (...) » qui constituerait un partage de la misère entre pensions de toutes façons faibles en général.
    L’impression que ce programme ne s’attaque pas franchement aux déséquilibres sociaux de fond de la société française se renforce quand on aborde la question du financement de ces mesures. Les Verts proposent d’abord de puiser dans les fonds de réserve des retraites. C’est-à-dire dans de l’épargne déjà constituée via des canaux contestables et contestés à l’époque – notamment en décembre 1995. Mais surtout, plus intéressant, de « élargir l’assiette de cotisation aux revenus du capital ». Mais un outil a déjà cette fonction : la Cotisation Sociale Généralisée (CSG). Tel que formulé par les Verts, il semble s’agir d’en pérenniser sinon le mécanisme, du moins l’esprit. Or, même avec la bonne intention de faire cotiser le capital, la CSG reste un dangereux cheval de Troie des libéraux. Tout d’abord, elle permet aux employeurs de baisser le salaire total dont une partie est désormais payée par tous et non plus par les seuls employeurs. Mais surtout, son véritable objectif est de dynamiter la Sécurité Sociale pour la faire passer sous la coupe de l’Etat, le grand rêve patronal. En effet, à partir du moment où une partie de l’argent récolté ne provient plus des seules cotisations indexées sur les salaires mais, en fait, d’une taxe sur des revenus du capital ou autres, à partir de ce moment donc, les gestionnaires de la Sécu se voient logiquement contester leur rôle par l’Etat régalien, à qui sont dévolus habituellement taxes et impôts récoltés. C’est pourquoi il a été adjoint à la CSG le vote du budget global de la Sécu par l’Assemblée nationale (le PLFSS). Et ce n’est pas un hasard si la récente idée du gouvernement de « grande Sécu » comprend son financement notamment par hausse de TVA et CSG, autrement dit en fiscalisant la Sécurité sociale. Cette mainmise du politique sur le syndical serait donc, en plus d’une injustice sociale, un recul démocratique.
    Ignorant ces risques, les Verts paraissent continuer dans cette préjudiciable direction au lieu d’augmenter les cotisations – surtout patronales – sur les salaires pour renforcer la Sécu, formidable outil de justice sociale par répartition des richesses à la source de leur création, amortisseur remarquable de gros chocs comme la pandémie du Covid. Ce choix vis-à-vis d’une institution sociale améliorable mais éminemment stratégique, avec un budget presque équivalent à celui de l’Etat, est regrettable. Car il mène vers une approche étatique et verticale des rapports sociaux, a contrario de l’éthique affichée par les Verts. En ne faisant pas confiance à la démocratie sociale qu’est la Sécu, ils seront entrainés vers une action publique aléatoire de redistribution après-coup des richesses produites. Et ce n’est pas leur louable proposition d’augmenter la représentation des salariés dans les instances dirigeantes des entreprises qui changerait beaucoup la donne.
    Pour comparaison, quelques points du programme du NPA : la Sécu payée par les employeurs et non par des impôts : la cotisation sociale comme mode de financement unique ; le système de retraite reposant totalement sur le principe de la répartition ; retraite à 60 ans (55 ans pour les métiers pénibles) avec maintien du salaire net ; retraites à taux plein après 37,5 annuités de travail (prenant en compte les années de formation et d’étude après 18 ans) et à 75 % du salaire brut. Aucune pension, aucun minimum vieillesse inférieur au SMIC revendiqué (1700 € net). Un service public du 3e âge avec des maisons de retraite en nombre suffisant et du personnel qualifié et bien rémunéré...
    AL décembre 2021