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    3 janvier 2024

    D’ANNEE EN ANNEE, L’HÔPITAL S’ENFONCE DANS LA CRISE

    6713, c’est le nombre de lits qui ont été fermés à l’hôpital en 2022. En presque 10 ans, la baisse
    cumulée atteint 39000 lits d’hospitalisation complète (1). Un seul exemple : au CHU de Besançon, en 2022, 58 lits d’hospitalisation ont été perdus, passant de 1084 à 1026. Sur les 1026 lits effectifs, 143 sont fermés par manque de personnel. La capacité d’accueil du CHU de Besançon est donc de 883 lits. 25 % des lits ont été supprimés depuis 2017.
    Ces chiffres nationaux sont assumés par l’Etat : il y a un « virage ambulatoire », il y a un manque de
    personnel et il y a d’avantage de chambres à un lit. Le manque de personnel est dû au numérus clausus médical des années 1980, 1990, 2000 et 2010, au manque de formation d’aides-soignantes et d’infirmières. Quant aux chambres à un lit, l’argument paraît quelque peu fallacieux : avec les moyens nécessaires, des chambres ça se crée.
    La conséquence de ce manque de lits est mesurable en temps réel. Aux Urgences, par exemple. "Je ne connais pas de service d’urgence qui échappe, aujourd’hui, au problème de manque de lits d’hospitalisation " dit Marc Noizet, président de SAMU-Urgences de France et urgentiste à Mulhouse (2). Tous les hôpitaux du pays sont touchés par la pénurie : dans le Var, un nombre croissant de services d’urgence sont contraints de fermer la nuit. Un sur deux. Dans le Finistère, 3 services d’urgence sont en grève depuis début décembre. A Fontenay-le-Comte (Vendée), un plan « hôpital en tension » a été déclenché. Les urgences de Luçon ont fermé toutes les nuits la dernière semaine de décembre. Celles des Sables-d’Olonne, trois nuits d’affilée... (3)
    Concrètement cela signifie des tris entre les patient.e.s qui arrivent aux urgences. Des préfabriqués médicalisés ou non pour des « consultations minute », destinés au premier accueil font leur apparition comme à Strasbourg ou à Argenteuil (95).
    Cela signifie aussi des pertes de chances pour les malades comme ce fut le cas d’un jeune homme de 25 ans, décédé aux urgences de l’hôpital d’Hyères (Var) dans la nuit du 30 septembre au 1er octobre 2023 (4). Ou encore celui de cet homme de 96 ans décédé sur un brancard au milieu de l’hôpital de Lons le Saunier dans le Jura (5). Ce ne sont que deux exemples récents parmi de nombreux cas depuis des années.
    La cause de ce désastre est parfaitement identifiée. Il s’agit de la politique qui fait de la Santé une marchandise comme les autres, soumise aux contraintes de budgets insuffisants. Ce qui amène même la direction de l’hôpital européen Georges Pompidou à lancer une collecte pour se payer un scaner.
    Décidemment, cette société malade de la loi du profit, avec ses gouvernements qui démolissent les services publics les uns après les autres, devient invivable. Au sens propre. Lucien Bonafé disait : « On juge du degré de civilisation d’une société, à la façon dont elle traite ses fous ». Cette phrase si actuelle pour la psychiatrie publique l’est aussi dorénavant pour les soins somatiques.

    (1) Bilan publié le 20 décembre 2023 par la Direction de la recherche, des études et de l’évaluation statistiques.
    (2) Le Monde des 31 décembre et 1er janvier 2024.
    (3) Ibid.
    (4) Voir l’article de Simon Fontvieille sur Médiapart le 16 décembre 2023.
    (5) Le Progrès 25 décembre 2023