NPA Bourgogne Franche-Comté
  • Décryptage (4)

    6 juin 2019

    Dans nos sociétés capitalistes, le discours dominant est celui de la classe dominante, minoritaire numériquement mais majoritaire dans les institutions, les entreprises et tous les postes de pouvoir. Ce discours nous imprègne chaque jour, relayé par les médias dont les plus influents sont aussi tenus par la bourgeoisie. Cet article, comme les trois autres qui l’ont précédé, se propose de débusquer quelques-uns des tours de passe-passe de ce discours à l’air si évident.

    Aujourd’hui, nous traiterons des mots « populisme » et « populiste ». De leur histoire complexe et aux définitions différenciées, nous retiendrons leur usage le plus courant du moment, à savoir celui d’une arme de guerre manipulée par les classes dirigeantes contre les aspirations légitimes de la grande masse des personnes qu’elles lèsent. Dès qu’une conception politique à peine partageuse se met en travers des volontés rapaces de la bourgeoisie, aussitôt elle brandit ces sortes de baguettes magiques supposées désintégrer ses adversaires.

    C’est aussi une marque de mépris de la part des dirigeants qui se pensent comme les seuls aptes à gouverner. Les contestataires sont ainsi disqualifiés par ces vocables péjoratifs : les capacités d’un côté, contre la démagogie de l’autre.

    C’est un peu le même rôle que celui attribué à la fameuse « prise d’otages » : dès qu’une action des salariés entrave le fonctionnement habituel d’une journée en terre capitaliste, c’est-à-dire entrave l’impérieuse production de plus-value, alors les mots-dynamites et autres torpilles de ce genre sont de sortie – suivis bien souvent de près par les CRS dans ce dernier cas. Cependant, m’objecteront certains, votre démonstration reste ambigüe vis-à-vis de l’extrême droite qui a droit également à cette accusation de populisme : ne se veut-elle pas d’ailleurs aussi une protestation contre ce qu’elle appelle « le système » ? Réponse : sa protestation, en ne touchant pas à la propriété des grands moyens de production, ni surtout à la plus-value, ne menace pas véritablement les intérêts de la bourgeoisie. Elle peut même être un dernier recours pour celle-ci. Elle mérite donc, en un sens, le qualificatif de « populiste » car elle leurre le peuple qui lui fait confiance.

    Mais, c’est là qu’on voit tout le vicieux de ce terme avancé par les classes dirigeantes actuelles : il amalgame notre camp progressiste avec le camp fasciste pour mieux nous stigmatiser. Un exemple entre mille : au soir du premier tour d’une législative partielle suite à la démission de Manuel Valls, ce dernier a salué ainsi le score de son candidat favori : « son véritable ancrage et sa capacité de rassemblement lui permettront de vaincre […] le populisme et les discours de haine ». Ainsi, Manuel Valls mettait indistinctement dans le même sac populiste la France Insoumise, qualifiée pour le deuxième tour, mais aussi le RN arrivé en troisième position…

    C’est pourquoi il serait préférable de toujours bien dissocier chaque camp en employant le terme de fascisme, plutôt que de populisme, à l’égard de l’extrême droite. Et de communisme, socialisme, progressisme pour qualifier le nôtre. Mais la lutte des classes étant ce qu’elle est, nos adversaires bourgeois ne l’entendent pas de cette oreille. Et ils choisissent des mots orientés selon leurs intérêts qu’ils défendent avec constance.